Apport des approches et outils de remédiation

Remédiation et pédagogie différenciée

« Peut-on former sans différencier ? » la réponse est non.
Il est en effet impossible de séparer les deux concepts de pédagogie et de différenciation. Apprendre, comprendre, c’est faire sien les savoirs. C’est les ramener à du déjà connu que l’on enrichit. Aucun apprenant n’ayant les mêmes connaissances de base, la même expérience, les mêmes représentations, les mêmes besoins, les mêmes motivations, former c’est accompagner l’apprenant sur  son propre chemin vers le savoir.
La devise de la pédagogie différenciée est à chercher chez J-M Ketele : «  Parler moins, faire agir plus, et observer pendant ce temps » (« observer pour éduquer »).

Les approches de remédiation

Selon  Philippe Perrenoud,  «différencier,  c’est  rompre  avec  la  pédagogie  frontale  –  la  même leçon,  les  mêmes  exercices  pour  tous.  Il s’agit surtout mettre  en  place  une  organisation  du travail  et  des  dispositifs  didactiques  qui  placent  régulièrement  chacun  dans  une  situation optimale.  La  pédagogie  différenciée  consiste  à  utiliser  toutes  les  ressources  disponibles,  à jouer  sur  tous  les  paramètres  pour  organiser  les  activités  de  sorte  que  chaque  apprenant  soit constamment ou du moins très souvent confronté aux situations didactiques les plus fécondes pour lui. Il s’agit donc d’amener chacun à son plus haut niveau de compétence».

Cette approche est donc particulièrement efficace dans le cadre de formations individualisées pour adultes (particulièrement en blended-learning) où le tuteur met en œuvrer un travail réflexif approfondi en cohérence avec le projet individuel de l’apprenant, en s’appuyant sur des ressources pédagogiques en ligne, développées et ouvertes en fonction de chaque parcours. La remédiation est en fait une re-médiation. il s’agit alors pour le formateur-accompagnateur de mettre une nouvelle fois l’apprenant en relation avec le savoir, mais d’une manière différente, en s’appuyant sur son vécu et la mise en œuvre de ce qu’il apprend. Cette approche reste formative mais se situe à la frontière avec le coaching individuel.

Remédiation cognitive

Une application particulière de la remédiation est la « remédiation cognitive ».
Elle est particulièrement employée dans le champ de la formation des adultes (hors système formel).
Il s’agit de programmes dont l’ambition est de refonder les apprentissages logiques de base par des progressions pédagogiques, à base d’exercices centrés sur l’entraînement au raisonnement.

Selon les termes de l’Association Francophone de Remédiation Cognitive, « La remédiation cognitive a pour objectif de diminuer les déficits cognitifs des patients. Ces déficits se manifestent en particulier sous la forme de troubles de l’attention, de la mémoire et des fonctions exécutives (rendant les patients incapables de structurer comportement et langage). Dans la schizophrénie, ils prennent également la forme de troubles de la cognition sociale (qui empêchent les patients de comprendre les intentions, les désirs et les émotions d’autrui).

Apport des outils médiatisés dans la remédiation cognitive

Le projet Gaïa est le fruit d’une collaboration, pendant plus de 2 ans, entre l’Association Francophone de Remédiation Cognitive (AFRC), le Service Universitaire de Réhabilitation du CH Vinatier, le CHU vaudois et Dominique GROS (Tutoractiv). Il repose sur le développement d’un outil permettant de rééduquer la capacité des personnes souffrant de troubles psychotiques chroniques (dont la schizophrénie) à comprendre les émotions exprimées par le visage d’autrui.

Cet outil repose sur un ensemble de modules interactifs de remédiation (jeux de rôle) qui ont pour vocation d’être utilisés, sous la supervision d’un professionnel de la santé en situation d’assistance (testés par le département psychiatrie du CH le Vinatier à Lyon, préalablement à une diffusion à l’ensemble du réseau français).

Ce projet est décrit dans l’ouvrage écrit par le Docteur Nicolas Franck, pilote du projet : « Remédiation cognitive » – Éditeur: MASSON – Date de parution: 09/2012

Ces outils utilisent les mêmes composants qu’un module e-learning classique à la différence que des instants de pause réflexive sont scénarisés et les feedbacks d’exercices reconstruits, afin de permettre à la personne et son accompagnateur de prendre le temps d’analyser en face à face :
• les enjeux de chaque activité, les points d’attention
• les phases d’exécution (hésitations, points d’arrêt, fluidité …)
• le bilan des échecs et succès en cours d’exécution (apprentissage, ressenti)
• le transfert de l’expérience dans la vie de la personne (rappels, projections)

> Exemple d’un module de remédiation : http://goo.gl/k2mDv
> Module de présentation de l’ensemble de l’application : http://goo.gl/U5zRT

Évaluation technique :

L’application de remédiation a été développée intégralement avec un logiciel auteur de production
e-learning (elearning maker / E-DOCEO). Ce choix repose sur plusieurs avantages :

• le prix de revient compétitif de l’ensemble de l’application (une trentaine de modules développés et réajustés après test en grandeur nature)
• la capacité de la faire évoluer dans le temps (ajout de nouvelles situations, modification des feedbacks en fonction des retours d’utilisation et de médiation …). À cet effet, l’équipe projet du Centre de Réhabilitation à Lyon sera formée à l’utilisation de l’outil auteur.

Perspective d’utilisation de ce type d’outils en remédiation

L’intérêt d’utiliser des outils médiatisés dans des dispositifs de formation hybrides mixant présentiel et auto-formation à distance et tutorée ne fait plus débat aujourd’hui. On pourrait le résumer par cette formule : « économiser du temps dans le transmissif pour l’investir dans l’accompagnement ».

L’utilisation d’outils médiatisés évolués (en 2 et 3D)  en remédiation (c’est-à-dire, en accompagnement de réalisation par l’apprenant, par un tuteur en face à face) est sujette à de plus vives discussions.

Pourquoi investir dans le développement de tels outils s’il faut investir en sus dans la mobilisation d’un tuteur en phase d’exécution ? 
La question est évidemment cruciale. Quels sont les axes d’utilisation de tels outils (fortement médiatisés) nécessitant une remédiation assistée ?
Il s’agit de mettre la personne en « simulation en temps réel » pour observer directement ses capacités en situation et en discuter avec elle en même temps: est-elle capable de faire face, comment réagit-elle, quelles sont ses perceptions, ses rappels d’expérience ?

On peut évoquer :

•  Le recrutement à forts enjeux et avec un processus très structuré et stable
•  L’évaluation en situation de reconversion professionnelle ou de ré-orientation 
(mobilité interne)
• L’accompagnement individualisé (post ou pré-formation) de personnes nécessitant une approche différenciée complémentaire.

En résumé

Il s’agit de sortir des limites d’utilisation des tests psychotechniques standardisés qui ne fournissent aucune réponse en termes d’adaptation des profils aux situations professionnelles réelles.


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