Un serious-game qu’est-ce que c’est ?

Casque sur la tête, regard fixé sur son écran, votre voisin de bureau semble concentré, absorbé par son travail. Vous tendez le cou et que remarquez-vous ? Il joue ! Un comble : Votre collègue ne sera pas renvoyé pour avoir joué pendant son temps de travail. Il sera même félicité s’il obtient un bon score !

C’est le monde à l’envers ? Non, car en réalité, votre collègue ne joue pas : il se forme…

Le jeu vidéo a donc fini par sortir des consoles de jeux de nos chères têtes blondes pour, doucement, faire sa place dans le monde de l’entreprise, sous la forme de ce qu’on appelle à présent les « serious-games ».

Une étude récente, réalisée par le Cabinet Vento, a mis en lumière que près de 48% des salariés ne savent pas ce qu’est un serious-game…Vous en faites partie ? Alors voici quelques explications.

Un coup d’œil dans le rétroviseur…

Il y a plusieurs années que les entreprises ont détecté l’intérêt de développer des jeux en ligne, le plus souvent à des fins marketing ou commerciales.

Souvent courts (quelques minutes de jeu) et percutants, ces jeux permettaient de mettre en avant une marque ou un produit.

On qualifierait aujourd’hui ces jeux d’ « Advergame » (de « advertising », « publicité » en anglais , et « game », jeu).

Ces jeux continuent d’exister, ils ont gagné en complexité et en temps de jeu.

Voici deux exemples récents :

  •  un jeu qui met en avant le célèbre déodorant  Axe
  •  un autre pour la sortie de Coca Cola Zero

Des jeux pour faire de la publicité, d’accord mais…mais comment en est-on arrivé à développer des jeux pour apprendre ? Voire à remplacer des formations « classiques » (dites « en présentiel ») par un jeu sérieux ?

Mutation de la population apprenante en entreprise : les gamers sont « dans la place » !

Dans les années 90-2000, les nouvelles technologies, l’amélioration des accès internet (haut débit notamment) et la baisse des coûts des matériels ont permis d’envisager l’utilisation de l’outil informatique à des fins pédagogiques. Ce fut l’avènement du e-learning (avec les succès et échecs que l’on sait).

Les apprenants d’aujourd’hui ne sont pas ceux d’hier. En 2010, les salariés jouent en rentrant à la maison sur leur Xbox, ou à la Wii avec leurs enfants ! Ils sont, de fait, devenus beaucoup plus exigeants que la génération précédente, notamment en matière de  » jouabilité ». Pour le dire simplement, le bouton « Suivant » des contenus e-learning « classiques » les ennuie prodigieusement !

Il n’en fallait pas plus pour que les sociétés éditrices de e-learning et celles issues du jeu vidéo notamment ne tentent de concilier les deux mondes en créant le serious-game dont l’une des particularité est justement de ne pas enfermer l’apprenant dans un processus linéaire d’apprentissage mais de l’immerger dans un contexte décisionnel permanent (un peu à l’image du « livre dont vous êtes le héros » des années 80).

Une définition

La définition du terme « Serious-game » parait donc simple a priori : c’est un « jeu pour apprendre », qui s’appuie sur les ressorts ludiques du jeu (scénario, immersion dans un univers, règles du jeu etc.) pour améliorer des compétences comportementales ou acquérir des connaissances parfois très complexes.

Mais soyons honnêtes : à ce jour, il n’existe pas de définition claire et acceptée de tous les acteurs du marché !Chaque éditeur a sa définition, certains inventent leur propre terminologie….ce qui ne facilite pas la compréhension et le dialogue ! Des chercheurs tentent de mettre tout le monde d’accord, tel Julian Alvarez et sa désormais célèbre thèse « Du jeu vidéo au serious game« .

Mon humble avis est que le terme « serious » n’a été accolé au mot « game » que pour rassurer une catégorie d’interlocuteurs, frileuse à l’idée de parler de « jeu » : dans le monde des RH et de la formation, on n’est pas là pour rigoler, mais pour former, qu’on se le dise !

En réalité, à ce jour, la seule définition qui, a priori, pourrait être acceptée de tous est la suivante : « Est considéré comme Serious game, tout type de jeu dont la finalité est autre que le simple divertissement ».

Un serious-game ou des serious-games ?

Sous cette appellation, vous entendrez parler de : edugame, learning-game, edumarketgame , advergame, businessgame, politicalgame, casual game, social game, simulateur etc. De quoi en perle son latin…

En vérité, AUCUN éditeur du marché ne devrait se dire « spécialiste serious-game » car, pour des raisons de coûts notamment, ils se sont tous, logiquement, spécialisés dans l’une ou l’autre catégorie.

Une terminologie déjà dépassée…

A mon sens, la terminologie « Serious-game » est en fait quasiment déjà dépassée puisque sous ce terme sont regroupées des types de jeux qui ont finalement assez peu en commun, tant d’un point de vue technologique que des objectifs à atteindre.

L’on ne devrait pas parler d’ »edugame », qui a une connotation « éducation » (voire « scolaire ») trop forte.

Le terme « learning-game » proposé par les intervenants de la société Symetrix me semble plus adéquat et peut qualifier autant des « jeux éduquants » à destination des adultes que des plus jeunes.

Les advergames et les politicalgames devraient être réunis en une seule appellation, tant il est vrai qu’aujourd’hui l’on utilise strictement les mêmes méthodes de vente pour un produit ou pour une opinion militante ou politique. Je sais que je ne me ferai pas que des amis en écrivant cela…mais: voyez le dernier jeu mis en ligne pour Greenpeace et vous partagerez peut être mon opinion.

Au final, je réduirais la liste des jeux sérieux à 3 sous-catégories ayant chacune ses objectifs :

Une nouvelle typologie ?

Certains produits, tels ceux réalisés par Daesign, combinent avec brio le learning-game et la simulation.

Attention néanmoins aux « mélanges des genres » …on imagine les réactions épidermiques que pourrait générer un jeu grand public qui prétendrait permettre d’améliorer ses connaissances dans un domaine et en profiterait pour faire l’apologie d’un produit ou d’une marque…les joueurs n’aiment pas être pris pour des zozos…

Mais si c’est fait intelligemment, cela peut parfaitement fonctionner : comme pour le jeu « Ace Manager » développé pour BNP par la société Paraschool conjointement avec TBWA.

J’espère par cet article vous avoir éclairé sur la terminologie. Et je vous prépare pour les semaines à venir :

  • un article sur les composantes d’un serious-game de type learning-game
  • un autre sur les secrets de fabrication d’un tel jeu

Bon week end à tous !


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